2.1

Pendant les jours qui suivirent, nos compagnons préparèrent leur voyage. Elena, puisque c'est ainsi qu'elle se nommait, n'avait pas grand-chose pour la retenir, si ce n'est deux ou trois familles de fourmiliers à dédommager.
Ses atouts naturels faisaient qu'elle s'en tirait en général à bon compte, quelle que soit l'espèce incriminée (elle avait un long passé d'équarrisseuse et un casier vierge, comme quoi, parfois, la vie est injuste).

Le Chat (il n'avait pas de nom, ou n'avait pas jugé bon de le donner), était comme tous ses congénères, son agenda était au mieux presque vide et totalement contradictoire. Il n'était donc pas pressé. Et il croyait vraiment en les capacités de cette humaine.
De plus, elle n'avait pas menti ; ce qu'elle faisait avec ses mains était tout bonnement prodigieux. Il était devenu complètement accroc à ses caresses, même s'il affectait une distance empruntée vis-à-vis d'elle et n'aurait jamais admis un traître mot de ce qui vient d'être d'écrit.

En un mot comme en cent, si ils n'étaient toujours pas partis, c'est parce qu'ils prenaient du bon temps. Cependant, tout a une fin, et la belle, sentant son désir d'illumination remonter, commençait à lorgner vers, alternativement, les animaux de la foret et son set de couteaux de boucher.
La sélection naturelle aidant, les plus petites bêtes à être resté dans les alentours étaient une famille de sangliers, et Elena avait beau être dextre, sa constitution était loin d'égaler celle d'un gaulois enrobé. Aussi l'accoucheur prit-il les devants et brûla la chaumière. Le climat étant dans cette région plutôt rigoureux, ils n'eurent d'autre choix que de partir sur les routes.

Enveloppée dans une pèlerine écarlate, quelques mèches tourbillonnantes dépassant de sa capuche, et accompagnée d'un gracieux mais de mauvaise augure familier (le matou était noir comme la suie, limite fuligineux), la jeune femme avait tout de la bohémienne jeteuse de sorts. Elle aurait préféré une vêture plus discrète, mais emporté dans son élan le Chat avait aussi incinéré la garde robe.
Dans ces contrées reculées, cette apparence n'allait pas les aider. Mais qu'était cet écueil, comparé a tout ce qu'elle allait y gagner ?

La neige tombait en gros morceaux ouatés, une bataille de polochons céleste. Les alentours s'estompaient, l'horizon n'était plus une ligne, ni même un contour, juste une impression.

Les routes et les chemins n'étaient eux-mêmes plus qu'un vague souvenir de lendemain de beuverie. Evidemment, dans ces circonstances, nos héros se perdirent ; il n'aurait plus manqué qu'ils passent à côté de ce pic narratif.

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